
Daphne du Maurier est une autrice que j’ai beaucoup lu à la maison jadis, mais uniquement pour les titres que nous avions chez mes parents : L’Auberge de la Jamaïque, Rebecca, La crique du Français. Il y a quelques années j’ai eu envie de les redécouvrir dans le texte original et de lire les titres que je ne connaissais pas – Le bouc émissaire est le deuxième roman, après le recueil de nouvelles (célèbre pour celle des Oiseaux), et Ma cousine Rachel, lu il y a quelques années.
Les oiseaux est une nouvelle que j’ai moyennement appréciée, ce qui m’arrive souvent avec les nouvelles, il faut bien l’avouer ! Pourtant elle a été rendue célèbre par son adaptation d’Hitchcock, en 1963, film que je n’ai toujours pas vu. Il dure deux heures, Alfred a dû broder un peu ^-^
Les romans de Daphne du Maurier, en revanche, m’enthousiasment. Ils sont super agréables à lire, immersifs, nourris d’une ambiance toujours très forte. Pour des histoires qui frôlent le drame présent, passé ou à venir, ce sont des récits qui arrivent à être miraculeusement positifs. Les personnages sont très nuancés, leurs personnalités se dessinent peu à peu, souvent par effet de miroir, par l’impact que chacun a sur autrui. Le genre de roman que l’on dévore, et qui fait longuement cogiter après !
Le bouc émissaire ne fait pas exception à la règle. Une histoire qui part d’une idée audacieuse, assez invraisemblable même (complètement même, scientifiquement parlant :P) mais qui donne lieu à un récit fascinant et passionnant, avec des personnages incroyablement vivants et crédibles.
« John, un historien anglais en vacances en France, rencontre au Mans par hasard son sosie parfait, Jean de Gué. Les deux hommes font connaissance : l’un est solitaire, sans famille, l’autre, épicurien désinvolte, se plaint de la sienne qui l’étouffe. Le lendemain matin, John se réveille, vêtu des affaires de Jean, qui a disparu. À la porte, le chauffeur l’attend pour le ramener au château. John prend alors la place de Jean… »
J’ai adoré cette histoire, dont on ne peut s’empêcher d’imaginer les fins possibles, toutes plus ou moins catastrophiques ! Passé le premier moment d’incrédulité (deux personnes pouvent-elles vraiment se ressembler autant, jusqu’à leurs voix, leurs mimétismes, leur pointure de chaussures, sans être de vrais jumeaux ?) tout le récit se déroule de manière parfaitement crédible. La personnalité du narrateur, un homme esseulé et dépressif, se heurte de manière spectaculaire à celle de l’homme dont il a pris bien malgré lui la place, un homme extraverti, libertin, cruel, égoïste… bourré de charme et de charisme.
J’ai adoré la fin qui, comme toujours chez l’autrice, reste ouverte sans être pour autant vague : ce que l’on a appris de la personnalité des personnages nous permet d’imaginer sans difficulté la suite probable qui, si elle n’est pas un happy ending rose et velouté, n’en est pas moins une libération pour le personnage central, que l’on appris à apprécier.
Un coup de coeur que je conseille à un large public !